un être de la nuit malveillant

Vigile est un mot apparu sous cette forme au 12ème siècle pour désigner un garde de nuit. Aujourd'hui encore le vigile conserve un rapport avec l'obscurité.
Vigile est de la même famille que veille. C'est celui qui reste éveillé pour nous défendre. Il a donc un grand pouvoir. Mais comme il est dans la nuit, il n'est pas éclairé. Nous conférons ce pouvoir à une personne qui n'est pas éclairée.
Avez-vous remarqué comme nous faisons toujours la même erreur?
Car le mot tel que nous le connaissons est apparu en réalité en 1948 où il est passé du stade de celui qui veille pour nous et sur nous, à celui qui surveille. Il y  a dans le mot veiller, une notion de bienveillance qui se perd lorsque le préfixe BIEN est changé en SUR.
Depuis une dizaine d'années les vigiles ont, par notre obéissance mue par la peur, pris un pouvoir énorme.
Ils choisissent qui doit entrer, qui doit sortir, c'est à dire qu'à l'intérieur d'un lieu donné, ils parviennent à créer un groupe qu'ils ont décidé, une mini-société qu'ils ont choisie.
Et nous sommes tous d'accord pour conférer ce pouvoir à un être de la nuit malveillant ?
Il ne s'est pas passé autre chose à la Flèche d'Or, par exemple. Le lieu a fini par fermer parce que les vigiles appartenaient à un gang local qui choisissaient qui pouvait dealer à l'intérieur et qui ne devait pas. Rentrait alors celui qui pouvait faire marcher ce commerce. On appelle ça la mafia et le gérant du lieu, qui ignorait cette appartenance, découvre avec effroi la réalité et prend peur. Et avec la peur, le vigile a alors tout pouvoir et le propriétaire finit par lui abandonner ses droits et son sort. Car tout lieu sur lequel veille la mafia court à sa perte. (Le lieu a fermé au printemps.)
Voilà ce qui arrive à une société rendue obéissante par la peur et qui a donné tout pouvoir à un être de la nuit malveillant.
Un être de la nuit malveillant, ça ne vous rappelle rien?

J'illustre encore une fois ma théorie sur les gens qui ne sont pas à leur place. Les morts chez les morts, les vivants chez les vivants. Celui qui est mort et qui déambule chez les vivants n'est pas à sa place. On l'appelle zombie.
Or celui qui veille est celui qui devrait dormir...
Et j'ai dit mille fois ici le danger qu'il y a à accepter que le zombie prenne le pouvoir. Mais encore une fois, gare à la confusion : C'est le Grand Zombie qu'il faut attaquer. Pas le petit.
Le petit zombie est celui qui a un rapport ambivalent avec sa volonté parce qu'il est perdu et sans guide dans sa nuit :
Le dictionnaire donne cette définition du zombie: "personne sans volonté". C'est faux. Il a une volonté. Celle d'abandonner sa volonté à d'autres : S'il laisse le Grand Zombie le diriger c'est parce qu'il le veut bien.

Hier soir  j'étais au théâtre pour entendre, à la suite du spectacle, la confession d'un comédien de mes amis : 
"J'ai allumé une cigarette dans le hall du théâtre, le vigile m'a sorti en me trainant par les cheveux".
N'y a-t-il pas comme un décalage? Une disproportion entre l'acte initial et la réponse à cet acte?
Avez-vous remarqué que vous obéissez très docilement à ceux qu'on nomme "vigiles"? 
Quelle légitimité ont-ils sinon de nous tenir par la peur?
Quelle société sommes-nous entrain d'accepter?

J'ai bien peur, pour ma part, que nous vivions dans une société de clébards! 

Nous serons libéré le jour où nous le voudrons bien.

Comments

[Le Groug]

« Une insurrection, nous ne voyons même plus par où ça commence. Soixante ans de pacification des bouleversements historiques, soixante ans d’anesthésie démocratique et de gestion des évènements ont affaibli une certaine perception abrupte du réel, le sens partisan de la guerre en cours. C’est cette perception qu’il faut recouvrer, pour commencer. »
(...)
« Nous partons d’un point d’extrême isolement, d’extrême impuissance. Tout est à bâtir d’un processus insurrectionnel. Rien ne paraît moins improbable qu’une insurrection, mais rien n’est plus nécessaire. »

L'insurrection qui vient. Comité Invisible.

[Le chevalier]

Les derniers mots sont magnifiques...J'ai un cerveau rétréci , paresseux mais je te lis parfois. J'aime beaucoup cette conclusion évidente...libérés de nous, nos peurs et dans ce grand truc froid à réchauffer qu'on appelle le monde.

Quand je suis face à des vigiles je me sens vite enfant, vite coupable de...vouloir sortir d'une salle hier avec un gobelet plastique contenant de l'eau?

Quand je suis face à des vigiles je me demande toujours comment je travaille moi, comment le perçoit l'enfant en face...

Mes amitiés